Les Soeurs de la Miséricorde

Il avait tenu à faire lui même le déplacement.
Des femmes qui disaient lutter pour le Bien et s'appelaient "Soeurs" entre elles, voilà qui promettait.

Bien sûr, ils s'était renseigné, ici et là, sur les places des marchés auprès de cancanantes marchandes, dans les tavernes enfumées il avait écouté les soliloques interminables d'ivrognes à l'haleine fétide qui rêvaient les yeux ouverts aux hammams de la cité des Amazones.

Il était temps de se rendre compte par lui même.

Il entra dans la salle. Déjà la pénombre régnait, adoucissant quelque peu l'effet intimidant des proportions gigantesques de l'endroit.
Une Amazone en robe allumait les torches une à une, halos dispersés et rougeâtres.

Le crépuscule n'était sans doute pas le meilleur moment pour une ambassade mais il avait flâné dans la cité et était resté de longues heures à visiter le jardin.

Il avait laissé, avec réticence, ses lames à la gardienne du lieu puis s'était avancé sur le sol de marbre blanc.

Il avait distingué une silhouette, près des lourdes tentures. Homme ? Femme ? il n'arrivait pas à distinguer. Il décida de se présenter pour ne pas surprendre l'individu.

Rejetant en arrière le capuchon de sa cape, il s'annonça.

Bonsoir...

Un léger silence, le temps que la silhouette lève la tête et s'approche de lui.

Pardonnez moi de me présenter à une heure aussi tardive. Si vous le souhaiter, je peux revenir aux première heures, demain. Je suis Sambre, Chef des Soeurs de la Miséricorde.
Pour vous servir.

Inclinaison du buste et mouvement balayant du bras.

En ce lieu je me suis rendu afin d'envisager une alliance avec vous.. Mais je brûle les étapes... Récemment installés en ces terres, nous sommes encore peu connues. Je suis ici pour répondre à vos légitimes questions...

Le buste se redresse, les yeux sombres se posent sur la personne maintenant en face de lui.
Attendant.

Gwenwyfar était restée tard ce soir là, elle appréciait le calme qui régnait dans cette pièce surtout après des journées chargées.

Il lui restait un rapport à lire, rien d'urgent cela pourrait attendre demain. Elle était sur le point de s'assoupir quand des bruits de pas résonnèrent sur le sol la tirant de son demi-sommeil.

Un homme se présenta à elle, il se prétendait chef des soeurs de la miséricorde ce qui étonna Gwenwyfar.

Gwenwyfar se leva et s'inclina légèrement afin de répondre au salut de son hôte tardif.

Bonsoir Messire, je suis Gwenwyfar chef des Amazones et prêtresse d'Artémis, prenez un siège je vous en prie.

Il est tard oui, et vous avez du faire un long voyage pour venir jusqu'ici.

Gwenwyfar tira sur un cordon derrière elle et un homme apparu.

Madame.

Faites apporter une légère collation pour moi et notre hôte et qu'on lui prépare une chambre dans l'aile des invités.

Bien Madame il en sera fait selon vos ordres, l'homme disparut pour revenir quelques instants plus tard avec un plateau chargé de boissons et de victuailles.

Je vous en prie servez vous messire Sambre, ma première question vous étonnera peut être mais pour moi qui suis Amazone voila un point que j'aimerais éclaircir.

Vous vous dites chef des soeurs de la miséricorde, je vous avoue que je m'attendais à voir une femme à ce poste, imaginez un peu un mâle à la tête des Amazones.

Soit cet homme était un fou ou un farceur et si ce qu'il prétendait était vrai Gwenwyfar brûlait d'envie d'entendre ses explications.

L'arrivée tardive avait finalement été payante. Il rencontrait la cheffe des Amazones.

Répondant à l'invitation de la prêtresse, il ôta sa cape puis s'installa sur le siège qu'elle lui désignait.
Il resta silencieux le temps que le serviteur revienne, contemplant les ombres mouvantes des meubles projetées par les torches, posant de temps en temps, sans la moindre gène ni dissimulation, les yeux sur la femme en face de lui.

Une fois le plateau posé, obeissant à l'injonction de l'Amazone, il versa le liquide rubis contenu dans la carafe dans deux coupes tout en écoutant la question posée par la servante d'Artémis.

Je vous remercie de votre hospitalité. Un homme à la tête des Amazones ?
Un léger sourire flotta sur ses lèvres à cette évocation...

Ce serait en effet fort étrange.. Une hérésie, en quelque sorte.... Mais n'avez vous point quelques mâles sous vos ordres ? Ce serviteur, par exemple ?

J'ai en effet abusé du titre de chef des Soeurs de la Miséricorde. Voyez-y là une trace de masculine prétention .... Je ne suis, en fait, qu'un Humble serviteur des Soeurs.
Comme vous le savez sans doute, en tant que pretresse d'Artémis - Gloire à son nom - La maison mère des Soeurs, dirigée par des femmes, est loin de ces terres...

Un léger silence, courte pause, comme un souffle retenu, peuplée de souvenirs. Le regard se voile, la voix devient plus rauque.

Mais elles ont souhaité s'implanter en ces lieux perdus où règnent le chaos et où l'absence de lumière se fait cruellement sentir. Elles ont alors envoyée une minuscule délégation, autant guerrière que religieuse, afin d'y implanter une mission. En tant que soldat-serviteur, je fus désigné pour mener cette délégation. Mais en aucun cas je ne suis la "mère supérieure" des Soeurs... Pardonnerez vous cet abus orgueilleux de langage?... Mais il est vrai que je suis le chef des Soeurs présentes sur les terres argentées...

Il tendit la coupe à la femme en face de lui avec un hochement de tête poli puis, se renfonçant dans le siège au haut dossier, but lentement une première gorgée.

Comme vous le dites si justement il y a bien des mâles dans cette citée mais sous nos ordres, aucun d'eux n'exerçant des fonctions d'autorité ici-même, même si certains comme Hannibal occupent de hautes responsabilités en tant qu'ambassadeur par exemple.

Gwenwyfar refusa poliment la coupe de vin que lui tendait l'homme.

Excusez moi je ne puis accepter ce breuvage, lors de mon entrée au service d'Artémis j'ai fait voeu de ne plus boire une goutte d'alcool, non pas que notre déesse l'exige, mais ayant un faible pour cette boisson auparavant jusqu'à l'abus j'ai fait ce serment et c'est en résistant à la tentation que j'éprouve en quelquesorte ma foi en notre déesse.


Gwenwyfar s'empara alors d'une aiguière et se servit alors un verre d'eau qu'elle but en observant son interlocuteur.

Votre clan est relativement nouveau mais pas totalement inconnu.

Nombreux sont nos ennemis et il en est même parmi nos alliés qui voient d'un mauvais oeil une citée où les femmes exercent de manière exclusive le pouvoir craignant une sorte de contagion, la brève histoire de Nona Decima Morta nous a été très préjudiciable. C'est pourquoi nous maintenons un service de renseignement très efficace qui nous a rapporté votre venue en ces terres.

J'avoue qu'au départ je voyais d'un mauvais oeil votre implantation, j'y voyais là quelques fanatiques prêts à semer le trouble. Je peux dire sur la base de certains rapports reçus ces derniers temps qu'il n'en est rien fort heureusement.

Une alliance entre nos deux clans est envisageable et je pense que ce serait une bonne chose de faire preuve de solidarité féminine, Gwen eut un sourire en regardant l'homme.

Dès demain je réunirais un conseil pour demander leur avis à mes soeurs, vous y êtes naturellement convié car elles auront certainement des questions à vous poser.

De retour à la bibliothèque, Hannibal se dirigea vers son bureau pour récupérer quelques dossiers quand il entendit une lointaine conversation.

Qui cela pouvait il être à une heure si tardive ??

Il avança et reconnut immédiatement la voix de Gwen avec un inconnu. Alors qu'il approcha de la porte il put entendre la fin de la conversation.

Bonjour ...

Il se dirigea vers l'homme.

Je me présente Hannibal, Sous chef des Fils d'Artémis et ambassadeur au sein de cette citée.

Se tourna vers Gwen

Comment vont les negociations ??

Le lendemain après-midi, le conseil fut rassemblé afin de débattre de la demande d'alliance des Soeurs de la Miséricorde.

[HRP]Sondage mis en place, si vous avez des questions c'est le moment[/HRP]

Il enfila sa cape. Un coup d'oeil dans la chambre vide, un autre sur le miroir, une main se levant, tentant de discipliner quelques mèches rebelles. Il était prêt.

Il descendit les escaliers aux marches branlantes, hocha la tête en guise de salut à l'aubergiste (étant étranger, il avait dû, la veille, payer d'avance) puis se dirigea de nouveau vers le Sénat de la Cité. Le conseil avait lieu dans l'heure.

En cheminant, il se remémora la fin de la soirée de la veille.




....la brève histoire de Nona Decima Morta nous a été très préjudiciable. C'est pourquoi nous maintenons un service de renseignement très efficace qui nous a rapporté votre venue en ces terres.

J'avoue qu'au départ je voyais d'un mauvais oeil votre implantation, j'y voyais là quelques fanatiques prêts à semer le trouble. Je peux dire sur la base de certains rapports reçus ces derniers temps qu'il n'en est rien fort heureusement.....

Il n'avait pas été vraiment surpris de la réponse prudente de Gwenwyfar, il savait bien ce qu'on disait des Soeurs de la Miséricorde et de leur conception du Bien... Par contre, il fut surpris que son ordre fut aussi connu... Ils avaient été jusque là relativement discret sur les territoires de Sarwyen.... Jusque là.....

Nona Decima Morta...Les chasseuses carnassières et castratrices...Oui, nous nous rappelons....
L'ancienne dirigeante des Amazones..je comprends que ça ai pu ternir l'image de votre clan... Après Aelis et la Mesnie Hellequin....

Lui aussi avait ses renseignements. C'était là manière légère de le montrer... Sans tenir compte du regard brusquement sombre de son interlocutrice, il poursuivit :

Fanatiques prêts à semer le trouble ?Un sourire amusé naquit soudain sur son visage. Il regarda la pretresse avec franchise et sympathie.

.. Mais vous aviez vu juste ! C'est exactement ce que nous sommes !!! Des fanatiques, soudés et intolérants, des illuminés ressentant leur mission en ce monde dans toutes les fibres de leurs corps, prêts à semer le trouble... Chez les adeptes du Mal, les assassins et les escrocs, chez tous ceux qui transforment ce pays en terre de larmes et de sang....

Je vois votre air surpris, n'ayez crainte, c'est là le guerrier miséricordieux qui parle... Mais la plupart de nos soeurs ne vivent que pour aider et protéger, soigner et consoler... Mais il est vrai que notre branche armée, dont je fais partie, a pour but d'éradiquer le mal de façon plus... brutale... quoique miséricordieuse...

Il allait développer lorsqu'un nouvel arrivant s'était avancé et présenté

Je me présente Hannibal, Sous chef des Fils d'Artémis et ambassadeur au sein de cette citée.

Il s'était levé et incliné à son tour :
C'est un honneur, Fils d'Artémis ! Je suis Sambre, chef mâle ... Regard complice et rieur vers la cheffe des Amazones ....des Soeurs de la Miséricorde, en ambassade au sein de votre magnifique citée.

Après la décision de Gwenwyfar de convoquer un conseil le lendemain, le reste de la soirée s'était déroulé calmement, à deviser des derniers évenements qui secouaient le monde argenté.

Il avait ensuite pris congés de ces hôtes et s'était rendu dans la taverne qu'on lui avait indiqué.



Et aujourd'hui, il était là, au bas des marches blanches menant au Sénat. Il monta rapidement l'escalier et se dirigea vers la salle du Conseil.
Après avoir été annoncée par la garde, il s'avança dans la salle, s'inclina avec respect devant les amazones rassemblées et attendit leurs questions.

Gwenwyfar accueilli Sambre le lendemain dans la salle d'audience des Amazones. Il n'était pas venu en terre inconnue et s'était bien documenté avant de se présenter ici, jusqu'au fait qu'Aelis ait rejoint naguère la Mesnie Hellequin.

Elle se souvint alors de cette nuit ou suivant ses traces pour la retrouver elle la vit en bien sombre compagnie : Deimos, Kaalith et Dragonnia.

Nul doute que les Soeurs de la Miséricorde avait pour intention de se développer et de s'implanter durablement sur Sarwyen.

Messire Sambre en ce qui me concerne ma décision est déjà prise et j'ai donné ma voix en faveur d'une alliance. Néanmoins j'aurais aimé une petite précision :

Je me demandais si les Soeurs de la Miséricorde abritaient d'autres mâles en leur sein ou si elles comptaient en recruter à l'avenir ?

Verrions nous alors l'émergence d'un second groupe appelé Frères de la Miséricorde ?

Les amazones le regardaient sans prononcer le moindre mot.
Il se demanda si c'était là signe de réprobation, de désintérêt ou une technique pour le sonder, voire le mettre mal à l'aise.

Lorsque Gwenwyfar lui adressa la parole, il répondit posément.

Notre ordre, malgré son nom, est un ordre mixte et l'a toujours été. Il n'y aura donc pas de séparation des sexes. Non, nous sommes tous et toutes des Soeurs... Certains s'appellent frère, d'autres soeurs... S'il y avait une division à faire, nous la ferions plut^to entre les soeurs combattantes et les soeurs soignantes, entre le temporel et le sacré, entre le commerce d'ici bas et la communication avec l'au delà, le séculier et le religieux...

Glissée dans un coin d'ombre, Suyana avait attentivement écouté les déclarations du curieux visiteurs. Tout cela n'était pas très clair. Un mâle s'appelant soeur, voila qui était très inhabituel. Mais qui était-elle pour juger des tendances de chacun? Et de toute façon, le débat ne se situait pas là.

Personnellement, la félys ne les avait jamais croisés. Il lui était donc impossible de connaitre leur position sur un élément essentiel de sa profession.

- Miiiiaa je vous souhaite bien le bonjour messire. Si vous le permettais, j'ai également une petite question qui galope dans ma tête depuis que j'ai eu connaissance de la raison de votre présence en ces lieux.

Je suis voleuse de profession. Et pour moi, l'augmentation du nombre de nos alliés signifie une baisse de mon activité. Aussi je souhaitais connaitre votre position sur la question. Si je croise un membre de votre clan, puis je me permettre de laisser trainer mes petites pattes dans sa bourse? Il est bien évident que je ne me permettrais pas une telle chose sur un allié en pleine chasse. Mais si il est gentillement endormi, sans méfiance au milieu d'une prairie, puis je m'autoriser un tel acte?

C'était à présent le tout d'une vive Félys, précédemment restée cachée dans l'ombre, de prendre la parole.

Il se retourna et l'écouta avec curiosité.

Ma foi, voilà question bien étonnante... Je sais qu'il est de coutume, sur ces terres, pour ceux qui se disent du côté du Bien, d'honnir le meurtre et l'assassinat mais d'accepter le vol et le brigandage, allant même jusqu'à considérer la profession de tire-laine comme aussi respectable que celle de guerrier ou de prêtre.

Ce n'est pas une opinion que nous partageons, nous Soeurs de la Miséricorde. On ne peut se déclarer dans la Lumière et tolérer la pénombre.

Le vol est chez nous banni. Pouvons nous accepter qu'un malandrin s'enrichisse en dérobant le fruit du travail de pauvres hères qui ont bucheronné toute la sainte journée ?

Ainsi, Ma Dame, ma réponse est claire : une telle pratique n'est pas acceptée par notre ordre.

Il s'inclina ensuite avec un sourire vers la voleuse pour tempérer l'aridité de ses paroles.

Suyana ne tenta pas de dissimuler sa réaction. Et ce n'était pas un sourire qui allait lui faire oublier les paroles prononcées. Son ton fut froid, cassant.

- Je comprends tout à fait votre point de vue. Ma profession est, par beaucoup, très mal vue. Votre réponse n'influera en rien mon vote dans cette affaire, car votre clan me parait tout à fait respectable.

Sur ces mots, la félys quitta la pièce après un bref salut de la tête adressé au diplomate. De toute évidence, sa présence ne faciliterait en rien les négociations si elle entrait en conflit avec le représentant des Soeurs de la Miséricorde. Alors mieux valait s'éclipser aussi vite qu'elle était venue, et espérer ne plus jamais croiser ce malotru.

Gwenwyfar avait écouté avec intérêt l'échange entre Suyana et Sambre et finit par intervenir.

Attends Suyana, ce point est important et doit être éclairci.

Elle se tourna vers l'émissaire l'air visiblement assombri par ses dires.

De plus je ne peux tolérer qu'on insulte un de mes lieutenants dans ma propre citée.

Messire Sambre mesurez vos paroles envers les voleurs et tout particulièrement envers Suyana, peut être la profession de prêtre est elle respectable et celle de voleur déshonorante et pourtant il est des prêtres qui déshonorent leur profession et des voleurs respectables, quand à la caste des guerriers dont vous faites partie la liste des meurtriers exerçant ce métier suffirait à remplir une bibliothèque.

Suyana est sous-chef de ce clan et un membre apprécié de cette communauté et même au-delà de nos frontières, elle n'est pas une vulgaire vide-gousset ou un bandit comme vous l'insinuez. Tout n'est pas que lumière et ténèbres, si vous ne pouvez tolérer la pénombre alors c'est notre clan tout entier que vous ne pourrez tolérer. Suyana est notre soeur et nous resterons solidaires.

Comme les prêtres et peut être même plus qu'eux les voleurs ont besoin d'exercer leur art sur les autres pour affiner leurs talents.

Pour ma part je n'ai jamais eu d'objection a être volée par un allié si la somme était modeste voire nulle où qu'il s'engageait à me rendre la somme volée si elle était importante.

Ne pourrions pas parvenir à un accord à ce sujet, si par extraordinaire Suyana venait à croiser un membre de votre clan et lui volait une somme importante notre clan en ma personne s'engage à rembourser la somme au cas où Suyana ne pourrait la restituer dans son intégralité, la moitié du larcin étant reversé immédiatement aux membres du clan.

La situation était tendue et Gwenwyfar était passablement énervée, la réponse de Sambre serait déterminante. Pour un émissaire elle l'aurait cru plus sage et avisé.

L'ambassadeur eut l'air confus. Et c'est avec embarras qu'il s'exprima :

Dame Suyana, si mes propos vous ont insulté, je m'en excuse sincèrement et humblement. Ne vous connaissant pas, je ne me serai jamais permis de porter un jugement en votre encontre. Votre position de lieutenant au sein de cette cité m'assure de votre respectabilité. Si j'en avais douté, jamais je ne serais venu ici en émissaire.

Ainsi, je vous demande, Amazones, de me pardonner si je vous ai froissé. Il n'était pas dans mon intention de venir à l'intérieur même de votre Sénat pour vous offenser.

Une pause. Assez longue. Sambre, apparemment, méditait sur la suite de son discours. Lorsqu'il reprit la parole, son attitude était plus sûre d'elle.

Il st vrai, Gwenifar qu'il existe des prêtres que l'on pourrait assimiler à des escrocs et que nombre de guerriers ne sont que de vulgaires tueurs. Il est aussi possible qu'il y ait des voleurs sympathiques et charmants. On peut même discuter des diférentes formes de vols, du pauvre mendiant qui vole un pain pour ne pas crever de faim à l'usurier qui endette les familles en détresse, en passant par les bandits de grand chemin ou les détrousseurs de cadavres.

Cependant, je maintiens ma position et celle des Soeurs quant à notre conception du vol... La réponse vous étonne probablement, tant une réponse convenue et positive vous semblait évidente. Il n'en est rien.
Hier soir, vous m'aviez dit que votre première impression était que nous étions des fanatiques. Je vous ai alors assuré que votre intuition était juste. Vous en avez, sur ce sujet, la preuve.

Permets moi de reprendre certains points e votre discours afin d'éclairer notre désaccord :

Vous dites que les voleurs ont besoin d'exercer leur art pour affiner leur talent. Probablement, comme chacun d'entre nous. mais le fait est que le vol en lui même est répréhensible.
il ne s'agit pas d'une affaire de quelques gopis et je pourrais me sentir insulté que vous le sous entendiez.... Tuer, blesser, voler sont des actes qui se font au dépends d'une victime et nous les réprouvons tous, sans exception. Là encore, je précie bien que 'est le vol que nous bannissons, sans préjuger, sans méjuger, des individus qui s'y adonnent...

Vous affirmez que tout n'est pas qu'ombre et lumière.... Hélas, ce n'est pas la philosophie des Soeurs. la pénombre n'est que l'antichambre des ténèbres et la neutralité n'est souvent que le synonyme d'indifférence...
Nous ne sommes pas de ces clans qui, parce qu'ils se contentent de ne pas tuer les faibles qu'ils rencontrent, se disent du côté du Bien. nous accordons nos actes avec nos croyances.
Je ne vous donnerai qu'un exemple : Il n'ya , pour nous, que des alliés ou des ennemis. Ce que certains appellent "pacte de non agression" est sans objet pour nous....

Peut être nous sommes nous mutuellement trompés sur la philosophie de nos deux clans...

Le chef de l'ordre se tut, attendant la suite.

Je crains très cher que nos deux clans bien que défenseurs acharnés du bien et luttant contre les forces du mal sur ces terres n'aient pas la même philosophie.

Votre vision du monde est trop manichéenne, le monde n'est pas noir et blanc et entre ces deux extrêmes il existe de nombreuses nuances de gris.

Vous avez de bien belles paroles moralisatrices envers les voleurs, mais ce n'est que de la théorie. J'aimerais bien voir les Soeurs de la Miséricorde à l'oeuvre quand elles auront besoin d'objets que seuls les talents d'un voleur permettent d'obtenir. Vous en priverez vous au nom de vos principes, j'ai du mal à le croire.

Outre Suyana, j'ai de nombreuses connaissances que j'apprécie chez les voleurs. Que vous combattiez le mal, fort bien je m'en réjouis !! Mais si au nom de votre croisade vous décidiez de punir tout les voleurs sans discernement alors prenez garde de ne pas vous retrouvez aussi dans le camps des meurtriers que vous combattez.

Gwenwyfar pris alors connaissance du résultat des votes, seul Chaldan fils d'Artémis parti momentanément en voyage n'avait pu voter. Elle annonça le résultat.

Quatre voix pour une alliance, quatre autres pour un pacte de non agression. En ce cas en tant que chef il m'appartient de trancher.

Gwenwyfar resta soucieuse un instant.

Je vous réitère une dernière fois mon offre : rembourser les éventuelles victimes de Suyana ou d'autres voleuses qui pourraient intégrer à l'avenir notre clan. Je n'aime pas beaucoup poser d'ultimatums si on peut considérer cela comme tel mais soit vous acceptez ma proposition soit il n'y aura pas d'alliance entre nous.

Gwenwyfar ne se faisait pas d'illusion, les Soeurs de la Lumière était bien un groupe de fanatiques, elle avait espéré un moment s'être trompée, il n'en était rien. Au nom du bien certains étaient capables des pires atrocités, prêts à tuer des innocents, ravageant et pillant des citées entières ne valant guère mieux que les assassins qu'ils combattaient.

Peut être valait il mieux qu'une alliance ne soit pas signée.

La félys réagit d'abord aux paroles de sa chef, un peu mal à l'aise de devoir émettre une opinion contraire.

- Désolée de te contredire, mais je suis contre un tel ultimatum. Les Soeurs de la Miséricorde se sont prononcées, et si un traité devait être signé, je m'engage à ne jamais les voler. Chose que je fais avec tous nos alliés, à une exception près. Et ce, quelque soit la gêne que cela entraine dans ma vie quotidienne. Vouloir leur imposer une telle condition me parait donc tout à fait déplacé.

Puis elle se tourna vers Sambre.

- Vous dites être contre le vol sous quelque forme, et pour quelque raison qu'il soit. Dans ce cas, pourquoi cherchez alliance avec des clans recrutant des voleurs? Vous ne pouvez pas contrôler tous les membres de chaque clan. Avec une telle restriction, les alliés ne seront pas légion.

Et comme Gwenwyfar l'a souligné, pour bon nombre de quêtes sur ces terres, vous aurez besoin des voleurs. Comment ferez-vous alors? Pour ma part, j'apporte toujours mon aide à ceux qui ne me dénigre pas. A vous de voir...

Sambre s'autorisa quelques instants de réflexion. la situation se compléxifiait, allant même jusqu'à provoquer une petite dissension idéologique chez les Amazones.

Il finit par prendre la parole, sous le regard scrutateur des femmes.
Il s'adressa tout d'abord à Suyana, avec un salut respectueux.

Votre proposition est toute à votre honneur et, si je n'avais pas cru votre cheffe au sujet de votre respectabilité, voilà qui m'aurait tout à plein convaincu.

Se redressant en posant son regard sur tous les membres de l'assemblée présente, il continua, d'un ton légèrement plus sec

Il y a, cependant, encore quelques malentendus au niveau des Soeurs qu'il me faut dissiper...

Concernant les objets que les voleurs, sur ces terres, sont susceptibles de me procurer... Encore une fois, je me répète, nous n'acceptons pas le vol mais nous pouvons pardonner aux personnes qui s'y adonnent, voire même les absoudre. Lorsqu'un individu nous aborde, sur un marché ou ailleurs, pour nous proposer divers objets, nous tentons, autant que faire se peut, de découvrir l'origine des produits proposés. Nous refusons ce qui est volé ou ramassé sur le cadavre encore chaud d'une innocente victime mais acceptons ce qui est acquis sans avoir provoqué perte ou souffrance.
Si dame Suyana ici présente me propose un de ses jolis cristaux qui parsèment en collier sa délicate poitrine, pourquoi devrais-je le refuser ? L'a-t-elle dérobé dans quelque bourse ? Ou l'a-t-elle, le plus honnetement du monde, extrait de l'alcove abandonnée où il reposait ?

A l'attention de la voleuse, avec un sourire :
J'espère ne pas vous avoir froissée en employant le terme d'"honnetement"....

Reprenant son discours :
Vous nous méjugez trop hativement... Nous sommes certes des fanatiques, et le rejet du vol en est l'exemple. Mais pas des fanatiques tels que vos paroles, Gwenwyfar, le sous entendent....

Une pause, bien trop théatrale pour être spontanée...

Ai-je dit que nous punissons les voleurs ? Vous faites preuve de trop de tolérance en acceptant l'activité de certains de vos amis parce que vous appréciez leur compagnie. Nous différencions activité et personnalité. Je peux trouver Suyana pleine de qualités mais néanmoins réprouver certaines de ses activités qui consistent à s'emparer du bien d'autrui.. Où est le manichéisme ? Est-ce pour cela que je vais tenter de lui amputer la main ou de la clouer au pilori ?
Il y a parfois d'autres façons de réprouver que la punition... La miséricorde est l'une d'entre elle...

Concernant une alliance entre nos deux... ordres, maintenant.
Je me permets, Suyana, de vous contredire. Je ne suis point venu en quête d'alliance, mais pour voir si une alliance était possible. Vous êtes un clan apprécié, vous n'etes pas des meurtrières, vous vous dites du côté du Bien. Autant de raisons qui m'ont poussé à venir discuter de nos morales respectives avec vous....

Gwenwyfar, vous me posez un ultimatum...
D'un allié, je ne l'accepterais pas. Car où est l'alliance si l'une des deux parties tente d'imposer ses choix à l'autre ?..
Alors, comment pourrais-je l'accepter de vous, clan honorable, certes, mais non allié ?...
Vous comprenez, j'espère, ma position. Vous avez dit craindre que nos deux clans n'aient pas la même philosophie. Je confirme vos dires avec une nuance. Pour ma part, il n'y a là aucun motif de crainte. Nous n'avons pas la même vision des choses, voilà tout...

D'un ton plus bas, comme voilé par une légère tristesse, ou un certain abattement :
Vous dites que le monde est une nuance de gris... C'est bien ce que je lui reproche, en effet, et contre quoi je lutte... Ces teintes ternes, passées...Cette grisaille... Pour tenter d'apporter éclat et brillance... Enfin... Ainsi soit-il....

Il se tut, soudain, comme désabusé. Puis il salua, révérencieusement, chacune des amazones et s'apprêta en relever son capuchon pour partir.

Gwenwyfar était un peu embarassée par la tournure des évènements, elle n'avait pas apprécié les dires de l'émissaire sur le métier de voleur. Certes le vol était un acte répréhensible mais considérer tout les voleurs comme des malfaisants c'était aller un peu vite.

La première intéressée ne semblait pas aussi choquée, peut être la force de l'habitude.

Mais Gwenwyfar n'avait pas trop le temps de réfléchir à tout cela, l'homme était sur le point de quitter le sénat.

Vous avez raison messire j'ai peut être parlé un peu précipitemment et j'ai commis une erreur en vous imposant un ultimatum. Pour une ancienne ambassadrice voila qui n'est pas très diplomatique, j'étais sous le coup de la colère je l'avoue.

Il semble que notre principale divergence au sujet du vol et des voleurs n'ait point lieu d'être du fait de Suyana, qui en ces lieux, s'est montrée bien plus sage que je ne le suis.

Ce problème étant réglé, enfinn je le crois, libre à vous d'accepter une alliance avec notre clan pour ma part plus rien ne s'y oppose et je n'irais pas contre car je juge dans notre intérêt mutuel cette alliance.

Certes même si nous défendons sensiblement les mêmes valeurs, nous n'avons pas la même philosophie sinon à quoi bon vivre dans des clans différents et ne pas tous nous regrouper au sein d'une même nation.

Tout comme lors de ce vote nous n'avons pas toutes eues la même vision des choses il en va de même avec nos alliés : Libertya, Fureur des Nains, Alliance Elfque, Alliance de Sarwyen et autres, tous défendent le bien à leur manière avec une philosophie différente.

A vous de voir maintenant si vous pouvez vous accomoder de notre philosophie et de voir si vous repartez avec un traité d'alliance en main ou non.

Jamais négociation n'avait été aussi ardue, d'habitude les demandes d'alliances se faisaient sans trop se poser de questions, peu importait la philosophie des alliés, pourvu que leurs objectifs étaient sensiblement les mêmes et que leur principal but était d'éradiquer le mal.

La balle était désormais dans le camp de l'émissaire, même si l'alliance n'était pas conclue au moins elle aurait eu le mérite de soulever quelques questions qui donneraient à Gwenwyfar matière à réflexion dans les jours à venir.

La première question était de savoir si les Soeurs de la Miséricorde avaient déjà fait d'autres tentatives d'alliance, avec qui et comment avaient été menées les négociations ?

Entendant le discours de la prêtresse, Sambre se retourna et ota son capuchon.
Tant que l'Amazone parla, il resta silencieux, semblant réfléchir à la décision qu'il allait prendre....

le choix me revient donc... Contrairement à vous, notre clan n'a rien d'une démocratie et je prendrais donc seul la décision...

Un silence. Pesant. Le guerrier, les yeux fixés sur les dalles de marbre, semblait peser le pour et le contre.
Puis il redressa le visage, un demi sourire sur les lèvres.

Vous êtes la première nation avec qui nous prenons contatc pour réflechir à une possible alliance. Comme vous l'avez vu, notre philosophie peut choquer même les esprits les plus ouverts et nous nous attendons à n'avoir qu'un très petits nombres d'alliés. Mais mieux vaut la qualité à la quantité, n'est-ce pas ?

Nous avons en effet des divergence quant aux notions du Bien et du Mal. Et je doute qu'un jour nos philosophies s'accordent... Cependant, vous avez fait preuve de tolérance et ceci suffit à mes yeux.

C'est donc avec plaisir et honneur que j'accepte votre proposition d'alliance. Vpous pourrez compter dès maintenant sur le soutien et l'aide des Soeurs en toute circonstances....

Puis, cabotin, il se lança dans une extravagante révérence pour conclure son propos.

Nous sommes ravies d'avoir pu mener ces négociations à leur terme et un terme positif qui plus est.

Bien que les votes aient été partagé le sentiment général envers votre clan semble favorable. Je prends donc la responsabilité de conclure cette alliance.

Frères et soeurs de la miséricorde porrons compter sur notre aide en cas de besoin.

Gwenwyfar était soulagée, jamais négociations n'avaient été aussi ardues. Le monde changeait de simples alliances entre clans on parlait désormais de traités entre nations, les relations politiques, les jeux d'alliance tout cela se complexifait de plus en plus.